Sois averti·e : si tu es un fin gourmet endurci·e, bouche tes oreilles. Mes prochains mots seront pour le moins obscènes : je ne suis pas une vraie cuisinomane. Une vraie passionnée de cuisine.
Je ne suis pas les restaurants qui ouvrent et ferment et rouvrent ni les phénomènes de mode en cuisine ni une multitude de cours de cuisine. Je ne fais pas dégustation du vin ni de tourisme culinaire. Enfin, je ne l’ai jamais fait.
Certes, la nutrition et la santé m’animent et et la science alimentaire pique ma curiosité. La vérité, c’est que je vibre plus à l’idée d’épater mes amis pour recevoir une pluie de compliments que de créer de nouvelles recettes impromptues. Appelle ça un faible estime de soi, je ne sais pas, mais ça me fait du bien.
Cuisiner, c’est du boulot. Je parle pour moi, hein.
Ça ne m’emballe pas de passer un temps fou et éprouvant pour les nerfs devant les fourneaux pendant plus d’1 h afin de réussir certains plats. Ça ne m’amuse pas à devoir nettoyer les éclaboussures qui ont volé sur la cuisinière, par-terre ou en dessous de la hotte. Et ça ne m’enthousiasme pas de laver les comptoirs tachetés de morceaux d’ingrédients et toutes les casseroles.
En effet, le nettoyage de casseroles et de tout le reste me rebute.
Une fois, j’ai vu sur Instagram la publication d’une fille qui montrait son comptoir en désordre comme on le verrait à la fin d’un repas pour dix personnes. Elle était toute stylée à la bohémienne avec un chapeau à bords flottants. Après avoir commenté pauvre toi, tu devras te taper toute cette vaisselle, elle m’a répondu que c’est ce qu’elle adorait faire. Ça la détendait. Soit elle était une grande menteuse, soit je suis anormale.
J’ai cuisiné avec une amie qui rangeait tout de suite après avoir utilisé un ingrédient. Hyper efficace. C’est évidemment ce qu’il faut faire, mais moi, je n’y arrive simplement pas.
En raison de cela, pour éviter de m’éterniser dans la cuisine et de me taper la vaisselle, je pourrais me nourrir de lentilles vertes à même la casserole à chaque repas. Du quinoa fade aussi. Avec un peu de sel. Et de l’huile d’olive. Et quelques épices.
Bon, je digresse.
Cette histoire commence avec des kits de repas que je recevais chaque semaine il y a deux mois de cela.
En effet, arrivaient devant ma porte, dans une grosse boîte, trois ensembles d’ingrédients séparés en portions en avance et parfois, partiellement apprêtés pour cuisiner des repas faits maison. Comment ça ? Tu dis.
Eh ben, ce n’était pas mon idée. C’était une initiative de M. Agréable.
Une ruse ingénieuse pour prendre plaisir à cuisiner
J’étais ravie de me poser le derrière trois fois par semaine et de me faire servir. Parfois, une fille veut simplement flemmarder.
Donc, oui, M. Agréable avait pris un abonnement du service de livraison de repas faits maison GoodFood, similaire à Hello Fresh en Allemagne ou Blue Apron aux États-Unis.
Pour que ça plaise à tous, il avait opté pour des repas végétariens. À vrai dire, ça a plus réjoui les gars que moi. Beaucoup des recettes contenaient une tonne de fromage. Je n’en consomme pas, moi, tu sais.
Mais j’ai pu trouver une façon d’en profiter aussi.
Les plats de Goodfood sont censés prendre le temps indiqué, mais honnêtement, ça me prenait toujours plus de temps que prévu. Ça aurait été moins le cas, si j’avais pratiqué les recettes mille fois. Il faut dire que je suis une tortue en cuisine aussi.
Si ce n’était pas des ingrédients précoupés, ça aurait été encore pire. On reçoit presque tout de sorte que ce soit prémesuré aussi.
En effet, les ingrédients se trouvent souvent dans des mini-contenants ou des sachets préparés pour te faciliter la vie. Parfois, c’est exagéré, je trouve. Tu peux te retrouver avec une gousse d’ail épluchée ou trois brins de persil dans un petit sachet ou un contenant.
Mon commentaire négatif : à la fin d’une recette, quoique faits à partir de matières recyclées, beaucoup trop de sachets et de petits contenants remplissaient ma poubelle. C’était épouvantable.
Autrement, leur réussite réside à coup sûr dans la rapidité de la préparation, le côté savoureux des plats et les instructions à suivre dans leurs fiches-techniques.
Ces fiches-techniques indiquent, à l’endroit, les ingrédients et le matériel à utiliser. À l’endos, on y retrouve la recette pas à pas avec des photos.
En tout cas, tout était délicieux.
Mon palais s’est délecté de plats d’inspiration mondiale.
Goodfood nous proposait des recettes venus des quatre coins du monde. De l’Orient à l’Occident, en passant par l’Italie, l’Inde et le Maroc.
Nous nous sommes régalés avec le dal de lentilles rouges au lait de coco, servi avec une salade d’épinards aux raisins de Corinthe et des naans chauds. Nous avons chargé nos bols avec le chili verde végé aux haricots blancs et à la courge musquée, accompagné de chips de tortilla maison. Nous avons attaqué le risotto citronné avec pois verts et basilic, garni de mozzarella fraîche – pour les gars – et accompagné d’une salade de roquette et de chou rouge.
Avant de t’achever complètement avec ces descriptions douloureusement alléchantes, je te parlerai de mes plats suprêmes. Je me suis léchée les babines avec deux plats absolument renversants.
J’ai émis plusieurs gémissements en aspirant bruyamment le mee goreng (nouilles frites aux épices) avec des nouilles de Shanghai fraîches et des légumes multicolores croquants, couronnée d’arachides concassées et parfumées à l’ail et au jus de citron vert et de feuilles de coriandre. (Le mee goreng est incontournable de la cuisine de rue indonésienne. Ici, il incluait des poivrons rouges et des carottes nantaises multicolores.)
Et plus que tout, je me suis presque évanouie en enfournant les patates douces rôties garnies de chana masala saupoudré de menthe fraîche, le tout reposant sur une purée ou sauce d’avocats rafraîchissante au concombre. La sauce était censée être un raïta composé de yogourt et de purée d’avocat, mais comme je suis anti-produits laitiers, je l’ai enlevé. La purée d’avocat contenait des ingrédients de base qu’on retrouverait dans le guacamole. C’était di-vin.
Même si la sauce avait été dépouillée, beaucoup de murmures et de soupirs se sont ensuivi.
En tout cas, chaque fois que je cuisinais les plats, je scrutais les fiches-techniques pour comprendre pourquoi les plats étaient si goûteux.
Et après quelques plats cuisinés, une lumière s’est allumée dans ma tête.
Des révélations assourdissantes.
En fait, les recettes étaient appétissantes en raison de deux choses : les sauces et les mélanges d’épices.
Sache, chèr·e convive, que j’ai fait des fouilles pour toi. Comme je t’ai dit plus tôt, GoodFood donne des super fiches de recettes qui indiquent, à l’endroit, les ingrédients et le matériel à utiliser et, à l’endos, la recette pas à pas.
Mais elles ne détaillent pas toujours précisément les ingrédients des mélanges des épices ou des sauces. Notamment, les demi-glaces de légumes.
Et c’étaient elles qui m’intriguaient énormément.
Tel un animal truffier, j’ai repéré le trésor sur l’emballage principal. En remarquant l’ajout de fécule de maïs, je suis arrivée à la conclusion qu’une demi-glace n’est pas moins qu’un bouillon de légumes épaissi. Ce serait une autre solution si tu n’en trouves pas en magasin.
Pour faire une histoire courte, j’ai essayé de reproduire le même résultat, mais je n’aboutissais pas exactement à la même texture ni au même goût.
Mais ma curiosité profonde m’a porté fruits.
Finalement, j’ai fini par dénicher une recette d’une demi-glace sur Internet que j’ai reproduite dernièrement. Elle contient une combinaison de légumes sucrés, salés et relevés et de champignons shiitake.
Quand j’ai eu terminé la préparation de ma sauce, j’étais ravie ! Et j’ai obtenu une quantité qui me durera pendant très longtemps.
La demi-glace était complexe et aromatique, riche mais certainement pas trop épaisse, soyeuse. Elle dévoilait une séquence d’arômes qui s'ouvrait avec la légère accentuation du vin, se poursuivait avec la saveur ronde et boisée des champignons shiitake et se terminait avec la douceur des betteraves et des carottes.
Je ne connais pas de meilleure façon de la décrire comme une sauce qui semblait impeccablement française, c’est-à-dire qu’elle avait un goût harmonieux et raffiné.
Elle assez renversante pour qu’elle fasse de moi une cuisinière prête à nettoyer les éclaboussures engendrées par ma maladresse et à les lécher amoureusement.
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